Le flou persiste autour des aides à la rénovation
La Fédération Nationale de l’Habitat et la Convention citoyenne pour le climat ont réclamé un renforcement du dispositif d’accompagnement et d’aide à la rénovation énergétique du parc de logements en France. La loi Climat semble soutenir cette requête, mais dans des proportions encore trop faibles pour faire une grande différence.
Le prêt « avance mutation »
Au rayon des nouveautés, le texte annonce la création d’un prêt « avance mutation » accordé aux ménages précaires et exclus du circuit classique du financement bancaire. Les fonds de ce crédit spécial servent à financer les travaux de réhabilitation et d’amélioration de la performance énergétique du logement.
Le remboursement du capital se fait in fine, lorsque le bien immobilier est vendu ou transmis par succession. Avec ce dispositif, la nouvelle loi se targue de pouvoir accompagner 5 millions de ménages dans leur processus de transition énergétique.
En réalité, le prêt « avance mutation » existe depuis 2006, mais il est rarement proposé par des banques réticentes à l’idée de prêter à des profils à haut risque. Le texte croit trouver la parade, en instituant une garantie partielle de l’État sur ce financement. Sauf qu’en même temps, aucune mesure coercitive à l’encontre des banques n’est mentionnée.
En l’état actuel des choses, l’avenir de ce « nouveau » prêt travaux paraît déjà compromis. Il pourrait hériter de la même destinée que l’éco-PTZ, un autre financement garanti qui n’a pas bénéficié du soutien des banques et distribué à 25 000 ménages seulement avant de tomber dans l’oubli.
Un accompagnateur rénovation public ou privé
La création d’un « accompagnateur rénovation » est une bonne nouvelle de cette loi Climat et Résilience. Sur le papier, ce dispositif répond à un besoin réel des ménages, souvent perdus entre les aides fiscales, les prêts aidés et autres mesures d’accompagnement énergétique de l’État et des collectivités locales.
Les contours de ce service d’aide restent cependant à définir par décret, de même que les mécanismes d’agrément des accompagnateurs.
Des investissements annoncés en hausse
Le texte promet une augmentation significative des investissements publics dans la transition énergétique, conformément aux lignes déjà tracées dans le premier plan de relance d’octobre 2020. Ce document prévoit près de 7 Milliards d’euros de dépenses, sur un total de 30 Mds€ consacrés à l’écologie, dans la rénovation énergétique du bâtiment, soit un niveau comparable aux investissements massifs de 2018.
Malgré la promesse inscrite dans la nouvelle loi, ces chiffres ne cadrent pas avec les exigences réelles du terrain. L’institut de l’économie pour le climat ou I4CE estime qu’il faudrait investir chaque année entre 13 et 19 milliards d’euros de plus par rapport à 2019 pour espérer obtenir des résultats concluants sur le climat et l’environnement.
Une obligation de travaux progressive pour les propriétaires bailleurs
La FNH avait recommandé aux législateurs d’inclure la notion d’obligation de performance lors de la rénovation d’un logement par les propriétaires bailleurs. Le texte voté le 4 mai fait l’impasse sur cette suggestion.
Cette contrainte légale s’applique aux 600 000 logements étiquetés G à partir de 2025. Puis, à partir de 2028, les bâtiments classés F à l’issue d’un DPE devront faire l’objet de rénovations.
Cette obligation s’étend aux habitations étiquetées E à compter de 2034. Les travaux en question devraient permettre aux logements de sortir de la catégorie « F » et « E », mais ce n’est pas suffisant. Avec ces niveaux de performance, les occupants ne ressentiront pas de grande différence sur leur facture d’énergie. À l’échelle du pays, les bénéfices pour le climat restent mitigés. Contraindre les propriétaires à cibler la catégorie B ou A du DPE aurait été plus ambitieux.
Le texte n’interdit pas la mise sur le marché des biens non rénovés après ces échéances. En revanche, ces logements pourront être considérés comme « indécents ». Le locataire sera alors en droit d’attaquer son bailleur en justice et d’exiger des réparations.
Statu quo pour les propriétaires occupants
La Fondation Nicolas Hulot et la Commission Citoyenne pour le climat espéraient une mesure forte concernant les 3 millions de ménages propriétaires qui habitent dans des passoires thermiques. Les Français eux-mêmes se disent favorables à une obligation de rénovation de leur logement, à condition de bénéficier d’un soutien public conséquent, selon un sondage mené par l’ADEME en 2020.
La loi Climat prend tout le monde à contre-pied : l’obligation progressive de rénovation de passoires thermiques occupées par leur propriétaire n’est donc pas pour tout de suite. Pourtant, cette transition aurait pu aider les ménages à diviser leur facture d’énergie par 4 ou par 6 en portant la performance énergétique de leur logement à la catégorie B ou A. Sans oublier qu’un bâtiment moins énergivore accroîtrait automatiquement sa valeur marchande.
Plusieurs ONG regrettent cet oubli volontaire. Rejoignant un commentaire du Haut conseil pour le climat, elles craignent que cette omission ne retarde les avancées climatiques de la France. Rappelons que le logement en France est responsable de 18% des émissions totales de GES et représente 40 % de la consommation totale d’énergie.
La loi Climat et Résilience reflète au final la posture bancale de la France en matière de transition énergétique. Malgré une opinion publique largement favorable à plus d’efforts, le gouvernement hésite à trancher.
On comprend aisément que les enjeux géopolitiques et financiers pèsent sur la balance et expliquent en partie la lenteur des décisions des pouvoirs publics. Cependant, alors que les dirigeants se perdent dans des tergiversations inutiles, l’échéance de 2050, celle de la neutralité carbone, approche.
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