Des discussions houleuses en vue
La déclaration signée par les Nations au sortir de la première séquence de la COP15 Diversité annonce 17 objectifs généraux, tous liés aux efforts mondiaux pour freiner la destruction de la biodiversité et le rétablissement du vivant.
Les ambitions du texte étaient très attendues dès le départ, compte tenu de l’échec des deux dernières conventions sur la diversité biologique. Les défenseurs du vivant espèrent que les parties s’accordent sur des objectifs au moins aussi louables que ceux décidés à Aichi, au Japon, en 2020.
Aucun de ces objectifs n’a été atteint fin 2020.
L’« Objectif d’Aichi », bien que juridiquement contraignant, manque cruellement de mécanismes et d’organismes de suivi.
Le prochain cadre mondial de la biodiversité devrait être plus strict et plus réaliste. Les négociateurs auront fort à faire pour abattre les nombreuses barrières sur le chemin de la protection et du rétablissement du vivant, à commencer par les réticences des poids lourds de l’économie mondiale, comme la Chine.
D’autres pays, comme le Brésil et l’Argentine, très dépendants de l’agro-industrie, s’opposent déjà à toute mesure entraînant la transformation de leur modèle agricole et économique. Avec l’Afrique du Sud, ces États n’ont pas approuvé l’objectif de protéger au moins 30 % des zones maritimes et terrestres.
L’énorme chantier des financements étatiques
Les États devront aussi répondre à la question très sensible du financement des actions de sauvegarde du vivant.
Dans un contexte économique post-Covid, marqué par le manque de visibilité et les incertitudes, l’appui des grandes puissances économiques est loin d’être acquis.
La tâche s’annonce encore plus compliquée quand on connaît les montants en jeu.
La déclaration des parties réunies à Kunming ne comporte aucun objectif de financement chiffré. Cette omission est un réel aveu de faiblesse, sachant que le brouillon publié en 2020 invitait les États à apporter au moins 200 milliards de dollars par an dans la lutte contre la perte de biodiversité.
Des intentions et peu d'actions concrètes
La déclaration de Kunming, bien qu’imparfaite et incomplète, envoie néanmoins un message fort à tous les États : la protection de la biodiversité est l’affaire de tous, y compris des citoyens, des TPE, des PME, des grands groupes, des associations, des peuples indigènes, des femmes et des enfants. Le texte contient aussi plusieurs points qui constituent de réelles avancées par rapport aux précédentes conventions-cadres.
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Création de mécanismes de suivi performants
Le premier objectif de la Déclaration invite les parties à « développer, adopter et implémenter » un cadre législatif plus contraignant et des mécanismes de suivi, de rapport et d’évaluation des actions en faveur de la diversité biologique. Ces dispositifs joueront un rôle central dans l’inversion de la courbe de destruction du vivant d’ici 2030 et dans l’application de la vision 2050 consistant à « Vivre en harmonie avec la nature ».
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Intégrer la biodiversité dans toutes les décisions politiques et financières
Le troisième point de la Déclaration appelle les gouvernements à placer la conservation et l’utilisation durable de la diversité biologique au cœur de leurs décisions stratégiques. Cela inclut les stratégies économiques, les plans de réduction de la pauvreté, les normes environnementales et industrielles, les régulations financières ainsi que les politiques de transport et de l’habitat.
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Inclure la biodiversité dans les plans de relance
Même si la pandémie couve toujours, les États préparent déjà l’après-Covid, à travers des plans de relance ambitieux dédiés au redressement de l’économie et à la restauration du pouvoir d’achat des consommateurs.
Selon la déclaration de Kunming, les gouvernements mondiaux devraient aussi promouvoir la conservation et le rétablissement de la biodiversité dans ces plans de relance.
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Supprimer les subventions néfastes à la nature
La suppression des aides et des subventions étatiques aux activités destructrices pour l’environnement est aussi un sujet sensible. On estime que les États participants à la COP accordent chaque année 800 milliards de dollars de financements à des secteurs reconnus comme responsables de la destruction de la diversité biologique.
Les énergies fossiles et l’agriculture intensive en font partie. La notification de ce problème dans la déclaration donne de l’espoir aux pays, scientifiques, organisations et citoyens qui réclament depuis des années l’arrêt de ces subventions.
Parmi les autres points positifs du texte figurent le renforcement des soutiens étatiques aux biotechnologies, la reconnaissance du rôle et des droits des peuples autochtones et l’amélioration des campagnes de sensibilisation sur l’importance de la biodiversité, pour faire évoluer les mentalités.
En l’état, ces objectifs reflètent l’intention et la détermination des États à protéger le vivant. Il reste encore un long chemin à parcourir pour voir ces ambitions converties en actions concrètes.
Aux décideurs politiques de transformer l’essai
Avec la déclaration de Kunming, les chefs d’État et tous les décisionnaires des grandes institutions comme l’ONU, le WWF, l’UNESCO, ou encore le PNUD, disposent d’une feuille de route qui va orienter les négociations sur le futur cadre mondial de protection de la biodiversité.
Les chefs d’État se réuniront en janvier 2022 à Genève pour engager la deuxième phase des tractations, avant de prendre une décision finale en avril-mai lors de la Convention en présentiel, programmée à Kunming.
Entre-temps, les dirigeants mondiaux auront tout loisir de mesurer les conséquences futures de leur choix et de leur prise de position sur l’avenir de la nature.
Cela représente plus de 12,5 % de la biodiversité connue à ce jour. Les décideurs politiques peuvent encore stopper cette hécatombe et inverser la tendance.
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