Mieux évaluer l’impact environnemental du numérique
Aujourd’hui, la France ne dispose d’aucune stratégie transversale consacrée à l’atténuation des impacts environnementaux du numérique. La Stratégie nationale bas carbone ne comporte aucune mesure concernant ce secteur.
L’arrivée de la 5G accentuera ce phénomène. Cette hausse de la consommation des DATA ne va pas sans une augmentation des émissions de gaz à effet de serre du numérique. De 2 % en 2019, la part de GES attribuable à ce secteur s’élèvera à 6,7 % en 2040.
Selon une étude commandée par le Sénat, cette malheureuse progression sera due à l’essor annoncé de l’Internet des objets (IoT) et la multiplication des centres de données.
La majeure partie des CO2 est libérée en amont, durant la phase de production des smartphones, tablettes et autres objets connectés.
Pour mieux guider les décisions publiques et les consommateurs, la loi sur la réduction de l’empreinte environnementale du numérique prévoit quelques mesures saluées unanimement par les politiques.
La création d’un observatoire permanent de l’impact environnemental du numérique est l’une d’entre elles. Ce dispositif sera placé sous l’autorité de l’Arcep et complètera son action. En effet l’Arcep, chargée entre autres de la régulation des communications électroniques collecte déjà plusieurs indicateurs sur les émissions de GES des opérateurs.
La loi oblige aussi le gouvernement à mettre sur pied une stratégie de soutien du réemploi et du recyclage d’équipements électroniques. L’exécutif doit soumettre un plan concret d’ici 6 mois. Les parlementaires exigent également une évaluation scientifique de l’empreinte environnementale des crypto-monnaies. Compte tenu du succès fulgurant de ces technologies, le rapport est attendu sous un an.
Une grande transparence demandée aux opérateurs
La loi votée par le Sénat début novembre exige des opérateurs télécoms qu’ils publient un compte-rendu annuel de leurs politiques de réduction de leur intensité carbone. Le rapport en question couvre plusieurs aspects des usages du numérique, comme les ventes de téléphones mobiles, l’utilisation des boîtiers internet, des décodeurs TV, ainsi que l’impact environnemental des data centers.
Les opérateurs devront aussi détailler leurs solutions pour soutenir la filière réemploi et le recyclage.
Les modalités de publication de ces rapports environnementaux restent inconnues. La loi prévoit de lister les indicateurs de référence dans un décret attendu à une date ultérieure.
Autre détail intéressant : certains opérateurs échapperont à cette obligation d’information. Les entreprises du numérique, qui réalisent un chiffre d’affaires inférieur à un pallier – encore inconnu – seront épargnées.
Cette exemption n’est pas la seule portée au projet de loi, très ambitieux, présenté à l’Assemblée nationale. Plusieurs dispositions radicales ont été allégées, voire supprimées par les députés, au grand dam des écologistes.
Une version édulcorée d’un texte contraignant
Même si le texte voté par le Sénat permet de grandes avancées dans la reconnaissance de l’empreinte environnementale du numérique, un sentiment de gâchis règne chez les parlementaires.
Plusieurs voix critiquent le travail de sabotage de la majorité, qui aurait manœuvré pour affaiblir les mesures phares de la nouvelle loi.
L’Assemblée nationale, contrôlée par LREM, a retoqué ce changement.
Le texte originel suggère aussi d’exonérer les produits reconditionnés de la redevance copie privée (RCP). Cette taxe d’une dizaine d’euros couvre les dédommagements versés aux éditeurs, artistes et auteurs pour l’utilisation gratuite de leurs réalisations stockées dans les tablettes, les téléphones ou d’autres appareils numériques.
Dans la version votée par le Sénat, ce passage disparaît. Les équipements reconditionnés seront donc assujettis à la RCP. Cette volte-face irrite les professionnels du réemploi et de la réparation.
Dans un communiqué, la fédération Rcube s’insurge contre cette imposition, jugée néfaste pour le pouvoir d’achat des Français et pour l’environnement.
La taxation de ces produits, qui plus est instituée dans une loi sur la réduction de l’empreinte environnementale du numérique, est un non-sens.
Pour ces raisons, plusieurs associations écologiques et des fédérations professionnelles accueillent la nouvelle loi avec scepticisme. Elles estiment que le texte aura un impact limité sur l’accroissement de l’intensité carbone du numérique.
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