Une décarbonation corrélée au prix de l’énergie
Sur le marché à terme de Londres, le prix du GNL a été multiplié par huit entre décembre 2019 et septembre 2021. Cette hausse devrait se poursuivre plusieurs mois encore, en prévision des surplus de commandes de l’hiver.
Ils évoquent notamment l’effet à double tranchant de l’augmentation du prix du carbone sur l’ETS. La tonne de CO2 sur le marché européen oscillait autour de 60 euros en octobre. Interrogé sur le sujet début novembre, le ministre de l’Économie français croit que l’augmentation des cours du carbone et des prix de l’énergie sera durable.
Bruno Le Maire s’est appuyé sur cet argument pour défendre une initiative visant à stabiliser le prix de l’électricité en Europe.
Selon d’autres spécialistes, la tendance haussière de l’énergie continuera tant que les principaux producteurs, comme l’Arabie Saoudite et la Russie, exerceront leur pouvoir de marché. Ces deux pays, conscients de leur position dominante, traînent des pieds pour ouvrir les vannes du pétrole et du gaz. La raison en est simple : le maintien de quotas de production à un niveau stable crée forcément une inflation des prix dans un contexte de hausse des demandes.
Ces puissances pétrolières et gazières ainsi que les autres membres de l’OPEP, ne trouvent donc aucun intérêt à augmenter leurs exportations dans l’immédiat, même si leurs productions ont fortement augmenté ces derniers mois. Les prix du gaz, et par ricochet, de l’électricité, seront volatils aussi longtemps que ces nations s’adonneront à ces intimidations à peine voilées.
Un coup porté au financement de la décarbonation
À ce petit jeu, le climat est le grand perdant. La crise de l’énergie actuelle empêche les entreprises les plus engagées de commencer leur transition écologique.
Le manque de visibilité, engendré par les fluctuations des prix, réduit à néant tout effort de planification d’une décarbonation rapide et efficace. Incapable de savoir quelle source d’énergie sera la plus fiable et la plus accessible dans le futur, les industries les plus consommatrices reportent leur processus de décarbonation.
En France, ce voile d’incertitudes laisse à quai les projets de transformation énergétique les plus ambitieux, comme celui de l’Union des industries utilisatrices d’énergie (UNIDEN).
La crise de l’énergie pose un autre défi de taille pour la décarbonation de l’économie.
Touchées au portefeuille, elles se résignent à réduire leurs investissements dans des technologies moins polluantes.
Dans l’industrie de la papeterie, par exemple, plusieurs acteurs ont dû ralentir, voire stopper l’aménagement de site de cogénération utilisant la biomasse comme énergie, faute de moyens.
Des industriels de l’agro-alimentaire rencontrent le même problème. Après avoir commencé le remplacement de brûleurs très émetteurs en CO2 en début d’année, ils ont été stoppés net par le manque de fonds. Afin de poursuivre leur sortie des combustibles fossiles, ces opérateurs réclament plus de soutien de la part de leurs partenaires et de l’État.
Efficacité, sobriété et EnR : le triptyque gagnant
Le casse-tête des entreprises n’échappe pas aux responsables politiques. Ces derniers se démènent depuis quelques mois pour trouver une solution raisonnable, sans sortir de la trajectoire fixée dans l’Accord de Paris. Le ministre des Finances reconnaît l’absence de « visibilité » sur les prix de l’énergie, tout en soulignant la nécessaire électrification de l’économie.
Selon lui, ce processus compte pour beaucoup dans la réduction des émissions carbone des entreprises. Du côté des opérateurs économiques, de plus en plus de voix se montrent en faveur du nucléaire.
Ces appels semblent entendus par l’exécutif, qui, par la voix du président Emmanuel Macron, a annoncé début novembre soutenir la construction de réacteurs nucléaires sur le territoire français.
Nicolas de Warren, président de l’UNIDEN, défend cette décision, invoquant la compétitivité des tarifs du nucléaire, sa fiabilité à grande échelle, ses capacités de production élevées et, surtout, son caractère prévisible. Cette énergie émet d’ailleurs très peu de carbone, un atout loin d’être négligeable au moment d’accélérer la transition écologique de l’économie mondiale.
RTE quant à lui, se tient loin de ces considérations politico-économiques. Le gestionnaire du réseau du transport d’électricité a identifié six trajectoires différentes, qui mènent toutes vers la neutralité carbone à l’horizon 2050.
RTE suggère aussi d’investir davantage dans l’efficacité énergétique, surtout dans le bâtiment et l’automobile, et dans la sobriété énergétique qui implique un changement de mode de vie et de modèle économique.
Les prévisions du gestionnaire rejoignent l’analyse d’un haut responsable du Boston Consulting Group.
Laisser un commentaire
Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *